2021 Reportage carpes

UNE JOURNEE, UN RECORD….

 Le bon jour au bon endroit …

Le jour se lève tout juste lorsque j’arrive à l’étang de Lamothe, un vent d’ouest souffle en continu comme un signe annonciateur que la légère pluie fine actuelle ne va pas tarder à s’intensifier. L’église du village sonne 7 h, il est temps de s’installer. Aujourd’hui j’ai retenu un secteur que je ne pêche pas souvent pour tendre mes lignes. Je vais me placer face au vent sur la berge opposée au poste n°1 « grenouilles », sur la longueur à gauche, entre les sorties de deux anses. J’espère que le vent va pousser des poissons dans ma direction. Depuis quelques semaines la pêche paraît difficile, les carpes ne sont pas trop mordeuses et bon nombre de carpistes se cassent un peu les dents en venant ici. Je pense que ces dames s’apprêtaient à rentrer en fraie lorsque le coup de froid de fin avril est intervenu stoppant net leurs intentions. Depuis nous sommes dans l’attente d’un réchauffement pour voir la suite des évènements. Nous sommes le 24 mai , et pourtant des cheminées fument encore dans les chaumières alors la situation est un peu compliquée.

Le début de saison a été prometteur avec de beaux poissons à la clé dont déjà  3 au-dessus de 18 kg sur ce petit étang, mais n’ayant pu réaliser des sorties comme prévu je n’ai pas grand-chose au compteur, alors tant pis pour le temps je tente le coup…

Après avoir mis en place un tarp (bâche de protection) pour être un peu à l’abri, je commence à préparer mes cannes, un saut vient attirer mon attention, un poisson manifeste sa présence devant la pointe du poste 1 quasiment dans les roseaux de bordure.

Une pop up épice saumon sur un montage chod rig décollé de 8cm compose mon premier piège que je lance dans l’anse de gauche à 4 mètres d’une bordure devant des branches surplombant l’eau. Autour je disperse une poignée de pellet et quelques billes de même parfum en guise d’amorçage sur le fond mou. Un back lead est placé sur mon fil pour immerger entièrement ma bannière et la  plaquer  au fond dans un souci de discrétion.

Ma deuxième ligne est expédiée dans la même anse en face de moi près d’un amas de branchages avec une bouillette coco banane surmontée d’une flottante blanche pour proposer une présentation en bonhomme de neige. Là aussi le fond est mou mais des petites branches  jonchent le fond. L’amorçage est composé de quelques billes de ce parfum, d’une poignée de baby corn et d’un peu de maïs doux.

Lors de la préparation de ma troisième canne un saut se fait entendre dans l’anse de droite classée en réserve ; je poursuis cependant mon installation en plaçant celle-ci en sortie de la même anse avec un montage feeder garni de farine. Une tiger nuts équilibrée vient conclure mon bas de ligne assez long (30 cm) posé sur un petit tapis d’amorçage  à base de ces graines, mais doux et baby corn sur un fond de graviers.

La pluie se renforce, le temps est venu de regagner mon abri… J’observe le vent qui pousse vers ma zone de pêche, je suis confiant : amorçage léger, montage équilibré, bas de ligne rigide en fluoro carbone, back lead sur toutes mes lignes…ça devrait marcher…

Au bout d’une heure le temps se calme un peu, j’ai eu le temps de boire un thé accompagné de quelques biscuits et je vais en profiter pour observer un peu si des poissons sont en maraude. Comme je pêche près de moi mes déplacements doivent se limiter au strict nécessaire et le plus discrètement possible  pour ne pas émettre de vibrations risquant d’alerter les poissons de ma présence. Lorsque l’on pêche près des bordures la discrétion est une chose primordiale, en effet les poissons possèdent des capteurs sensoriels sur le corps qui leurs permettent de communiquer entre eux, de ressentir ce qui se passe dans leur environnement et de se repérer. Ainsi des vibrations émises par des pas ou un véhicule peuvent se ressentir très loin sous l’eau et mettre en fuite des poissons quels qu’ils soient. Si vous allez vous baigner cet été dans un lac fréquenté, mettez la tête sous l’eau et vous ressentirez les gens marcher dans le sable ou sauter dans l’eau à plusieurs dizaines de mètres de vous. Faites ce test et vous comprendrez…

Lors de mon observation des mouvements d’eau venant du bord à ma droite attirent mon attention, des poissons semblent être présents le long des iris et dans des branchages. C’est décidé j’y pose un montage ! Reste à déterminer la présentation…

Depuis quelques temps des pêcheurs pratiquent la pêche de la carpe à la grande canne sur le plan d’eau avec de bons résultats et arrivent souvent à sortir leur épingle du jeu même dans de mauvaises conditions alors que les détecteurs des carpistes restent muets. Ayant déjà fait les frais de ce type d’expérience je me suis intéressé de plus près à leur technique afin de voir comment l’amorçage ou les appâts pouvaient être adaptés à ma pratique. L’un d’eux que je connais depuis longtemps m’a expliqué sa façon de faire, l’amorce qu’il utilise, ses montages…

Alors je me suis dit pourquoi ne pas essayer avec un montage léger équipé d’un bouchon, une faible plombée, un petit hameçon et du maïs doux… Sans plus attendre je démonte la canne prévu pour mon fils (qui devrait venir à midi) et je mets un flotteur style anglais pré plombé bloqué par un arrêtoir, une petite olivette de 4g et je relis un bas de ligne de 30 cm à l’émerillon. Puis je viens mettre deux grains de maïs doux additionné à un grain factice flottant sur un montage german rig avec un hameçon n°6. Ma canne ainsi équipée sur le modèle de la pêche en stalking est posé dans une trouée d’arbustes, mon montage lancé à 4 m du bord sous une branche. Quelque petites boules d’amorces feeder sont dispersées autours pour accompagner une poignée de maïs et du baby corn.

L’attente peut recommencer, je m’éloigne et reviens vers ma base…

10h30 ; je me suis assoupis dans la voiture lorsqu’un de mes détecteurs s’emballe, la couleur bleue sur ma centrale m’indique que c’est ma cannes « stalking » qui part…je m’en saisi pour commencer le combat. Au contact le poisson me paraît beau mais décidé à gagner les branches plus loin pour se mettre à l’abri, il va falloir la jouer serré pour voir ses barbillons. J’incline mon scion vers l’eau pour déstabiliser mon adversaire qui redouble d’effort en sondant vers le fond pour regagner son refuge. Finalement il décide de tenter sa chance vers le large pour m’entraîner dans je ne sais quel obstacle avant de se résigner à revenir vers la berge. Au vue  du trajet de mon fil j’ai l’impression qu’il veut directement monter sur le talus mais c’est surtout pour mieux tenter sa chance de libération dans les racines des iris de bordure. Au bout de 10min je ne sais toujours pas à qui j’ai affaire, mis à part quelques remous je n’ai toujours pas vu la moindre écaille. Ma prise se rapproche, je prépare l’épuisette mais le poisson n’a pas dit son dernier mot et repart vers le large en remontant pour finalement crever la surface une première fois. Je la vois dans un remous suivant l’éclaboussure, c’est une belle, il va falloir assurer dans si peu d’espace. Les minutes sont interminables, c’est chaud, à chaque rush je crains que ma ligne se prenne dans une branche…elle revient en surface et mets un coup de queue énergique, la scène se répète une fois de plus avant que son premier passage devant l’épuisette ne lui soit fatal. Je referme le filet sur elle pour la sécuriser avant de ramener le tout vers moi. Je la vois enfin, au fond du filet et je constate sa taille avec stupéfaction. Mais c’est surtout en la sortant de l’eau que je me rend compte de son poids…après trois pesées pour être certain de ce que je vois le peson affiche 21,700 kg …attention ne nous emballons pas il faut déduire 1,5 kg de tare pour le poids du sac. Verdict 20,200 kg !!!

Je suis comme un dingue, je viens de faire tomber le record de l’étang qui était de 20 kg…

Après la séance photos la belle peut rejoindre son élément et se remettre de ses émotions comme moi.

Le reste de la journée a été calme, le remue-ménage sous les branches a surement eu raison des habitantes du secteur mais ce n’est pas grave, le bonheur est là. 

Au final je n’aurai jamais imaginé prendre  un tel poisson en arrivant ce matin et encore moins au maïs doux. Comme quoi il faut adapter sa pêche en fonction de la situation et ne pas hésiter à prendre des idées auprès des autres pêcheurs. En somme je peux dire que nous avons tous quelque chose à apprendre des autres.

Xavier